Encore un autre coup d’État en Afrique de l’Ouest. L’Afrique détient le record de coups d’État tous continents confondus. Plus de 200 coups d’État ont été enregistrés sur le continent, selon VOA. Ces deux dernières années, une région en particulier donne des coups d’État à décrypter aux analystes politiques et aux médias. Telle une épidémie qui se propage, les États ouest-africains chopent un à un le virus des coups d’État. La sous-région est empreinte à des putschs tous azimuts. Mali, Burkina-Faso, Guinée et maintenant Niger. Depuis le 26 juillet 2023, le Niger est en proie avec un putsch qui n’est toujours pas entériné par le Président Mohamed Bazoum, dont la démission est encore en suspens. La question qui demeure avec cette succession de coups d’État dans la région est de savoir quel est le prochain État africain à voir les militaires prendre le pouvoir. Ce questionnement est d’autant plus légitime, car le continent est historiquement le berceau des putschs.
Les coups d’Etat en Afrique, une vielle tradition
L’histoire politique du continent africain est jalonnée de coups d’État. Ces nombreuses tentatives de coups, quand elles n’aboutissent pas, réussissent à déstabiliser les États dans lesquels ils sont perpétrés. On peut compter aisément le nombre d’années où l’Afrique n’a connu aucun putsch. Ces tentatives de déstabilisation de l’État semblent être des moyens de contestation du fonctionnement des États Africains. La problématique est que les militaires se présentent comme des sauveurs, qui viennent rétablir un État plus juste et plus efficace, sans que lesdits États subissent de réelles refondations. La plupart de ces États se retrouvent avec le même système, sans remettre en cause les bases qui étaient combattues par les putschistes.
Des coups d’État symptomatiques de la démocratie de l’homme fort
Ce qui est frappant dans la répétition quasi systématique des coups d’Etat dans les crises en Afrique, c’est qu’ils n’ont quasiment aucun impact réel sur le destin des peuples. La preuve est que malgré les nombreux putschs perpétrés, le continent fait face aux mêmes problèmes que les mêmes militaires cherchent à résoudre par la force. La force, c’est d’ailleurs cette caractéristique de nos modèles démocratiques qui le rend fragile. En Afrique, le pouvoir exécutif est concentré dans les mains du Président de la République, qui est souvent très fort. Si fort, que les contre-pouvoirs sont à sa solde et obéissent quasi systématiquement à ses ordres.
En résumé, le pouvoir est concentré dans les mains du Président. Et il assume donc légitimement la responsabilité de tout ce qui arrive dans son État, puisqu’il décide tout (ou presque). Sauf que la seule institution que le Président ne peut pas contrôler directement, c’est l’armée, si elle décide de ne plus lui obéir. Et c’est ce qui se passe dans les derniers cas de putsch enregistrés, surtout en Afrique de l’Ouest. Sauf que la même histoire se répète, avec un militaire désigné comme « nouvel homme fort » (ce n’est jamais une femme). Ce nouvel homme fort est aussi fort que celui qu’il vient de déchoir. Telle une roulette russe, l’histoire se répète. Mais, suffit-il pour les militaires d’être en désaccord avec les hommes forts, pour devenir les nouveaux hommes forts d’un Etat, et de risquer sa stabilité politique ?
Et si c’était à ça que se jouait le prochain coup d’État ?
La question est évidente. Dès que les désaccords entre les militaires et le pouvoir, démocratiquement ou presque, élu surviendront, on pourrait assister à un nouveau putsch dans la région. La tontine des coups d’État dans la sous-région se poursuivrait, remettant ainsi en cause les années de stabilité de certains États. Mais, les militaires ont-ils toujours raison ? Sont-ils dépositaires du manuel de bonne conduite et de bonne gouvernance de nos États ? Ne font-ils pas eux aussi partie du système qu’ils disent vouloir démanteler ? Ne sont-ils pas instrumentalisés pour divers enjeux ?
En tout cas, ce qui est sûr, un coup d’État n’est pas une solution pérenne pour assurer le développement d’un État. La jeunesse peut s’exprimer de différentes manières. Les armes ne résolvent généralement rien. La belle preuve, le continent avance à tâtons. Aussi, faudrait-il que ces coups d’État réussissent à faire poser de nouvelles bases aux États concernés. Il faut aller au-delà de simples changements de noms, de langue officielle ou de capitales, à des choix institutionnels plus cohérents et qui rompent avec le système institutionnel de l’homme fort. En attendant, faites vos jeux : quel est le prochain État ouest-africain à ramasser la tontine des coups d’État ?